Romancier né en 1923 à Lons-le-Saulnier, Bernard Clavel a écrit plus d’une centaine de livres – essentiellement des romans, mais aussi des livres pour enfants, des récits, quelques essais. Son œuvre, résolument humaniste, a touché des millions de lecteurs de tous âges et de tous les milieux – il a longtemps compté parmi les écrivains préférés des Français.
« Porteur de mondes », « Le dernier des Justes », « Une énorme stature d’écrivain » : ces quelques titres d’articles qui lui sont consacrés illustrent la place qu’il occupe dans la littérature. Photographies, aquarelles, dessins, reliures, sculptures, sont partie intégrante de cette œuvre.
Bernard Clavel a reçu, en 1968, le prix Goncourt avec Les fruits de l’hiver. Mort en 2010 à l’âge de 87 ans, il avait rédigé, pour le « Dictionnaire des écrivains contemporains de la langue française par eux-mêmes » publié par Jérôme Garcin, sa propre notice biographique en 1988 à lire ci-dessous.
A quatorze ans, ce fils de boulanger quitte l’école pour le fournil. Ça se sent. Sa culture limitée est pleine de trous. Il connaît mieux le vignoble, les bateaux et la taïga que la littérature. A quinze ans, il écrit déjà des romans, mais ne sera publié qu’à trente-trois ans. Soutenu dès ses débuts par les plus grands (Maurois le comparait à Tchekhov), il sera toujours poursuivi par la hargne des roquets de la critique qui ne sauraient lui pardonner ses tirages…
Il déteste trop les intrigues et le parisianisme pour rester à l’Académie Goncourt où il a pourtant de bons amis. Tout le temps que ne lui prennent pas ses déménagements, il le passe à écrire. La grande chance de sa vie comme de sa carrière est la rencontre de Josette Pratte, écrivain québécoise, qui, obligeant ce fonceur à retravailler ses œuvres, va le faire accéder à une dimension qui lui permettra d’augmenter considérablement son public.
Il aime à répéter que l’essentiel de son bagage lui vient de son enfance. Il voue un culte à ses parents, à sa tante Léa et à son oncle au képi blanc dont les récits des campagnes d’Afrique ont bercé ses jeunes années jusqu’à l’inciter à s’engager. Mais la guerre et ses horreurs font de lui un antimilitariste forcené qui deviendra l’ami intime de Louis Lecoin.
Il placarde aux murs de son bureau des phrases qui vont l’accompagner partout :
Sa plus grande joie d’écrivain lui vient des écoles où il entre dès ses premiers romans publiés. C’est la revanche de celui qui, au fond, regrettera toujours de n’avoir pas eu de temps à consacrer à l’étude. Il sait pourtant que ce qui nourrit son oeuvre ne vient pas de ses lectures, mais de ce qu’il a vécu ; et Jean Guéhenno, dont il est heureux et fier d’avoir été l’ami, lui répète souvent qu’il lui envie « son torrent de conteur ».
A ceux qui lui reprochent d’écrire trop il répondra en essayant jusqu’au bout d’écrire davantage, en transpirant toujours plus, faisant sa devise de ce mot de Mauriac : « Notre vie vaut ce qu’elle nous a coûté d’efforts. »